(Article à paraître dans la revue Démocratie d’avril 2018)
Quand on y réfléchit, une chose ne peut manquer de susciter un grand étonnement (du moins chez ceux qui n’ont pas encore renoncé à l’idéal démocratique) : depuis une cinquantaine d’années, les Belges ont connu six réformes de l’État et aucune n’a fait l’objet de leur consentement. Plus généralement, jamais le peuple belge n’a pu se prononcer ni sur sa Loi fondamentale en tant que telle, ni sur ses diverses évolutions historiques, mêmes majeures, ni non plus d’ailleurs sur l’adhésion aux Traités européens ou internationaux (malgré leur impact très significatif sur les orientations et les marges de manœuvre des politiques publiques). Une septième réforme de l’État pourrait encore survenir dans un avenir proche, qui ne serait, dans le cadre des règles actuelles, pas plus que les précédentes, soumise à l’approbation du peuple belge.
Et le plus étonnant dans cette histoire n’est-il pas que la société civile, les citoyens, même lorsqu’ils critiquent certaines conséquences subies[1] de ces réformes constitutionnelles ou adhésions à des traités, ne réclament pourtant aucun droit de regard, aucun pouvoir formel en la matière ? Comme s’ils avaient accepté l’idée de ne pouvoir être que des spectateurs passifs assistant à une pièce jouée par d’autres. Comme s’il devait aller de soi que les modifications de la Constitution ne peuvent être l’affaire que des élus et de leurs partis. Les citoyens, les collectifs, les associations, les mouvements, bref, la société civile n’aurait pas à s’en occuper. Peut-être sommes-nous conditionnés par notre histoire politique marquée par un dogmatisme représentatif, que l’on retrouve aussi dans la procédure de révision de la Constitution? (1) Lire la suite « Comment se réapproprier notre Constitution ? »